dimanche 2 mai 2010

Guyane : Televisão brasileira, mode d'emploi

Le « paysage audiovisuel guyanais » n'a sans doute jamais été aussi riche. Avec ces antennes paraboliques toujours plus imposantes qui fleurissent sur les toits, ce sont les canaux du monde entier, notamment du Brésil, qui se retrouvent à portée de télécommande. Un marché parfois juteux et souvent très anarchique...

 

Treize heures hier à La Mâtine : les enfants de Fernanda se balancent dans un hamac en regardant des dessins animés en portugais dans le texte. Dans la case d'à côté, un autre écran crache le résumé d'un match de Copa Libertadores qui a opposé, la veille, Flamengo aux Corinthians, deux équipes brésiliennes rivales. Même si les conditions de vie sont précaires dans le quartier, tout le monde ou presque a la télé. Maria, elle, capte une trentaine de chaînes. Une imposante parabole surplombe le toit bancal de son tout petit chez elle. « L'antenne vient d'Oiapoque, parce que là-bas c'est moins cher » , avance-t-elle d'entrée. « On a un monsieur dans le quartier qui s'occupe de tout. Ca ne coûte que 400 ou 500 reais (environ 200 euros) » .

« Une boîte pour plusieurs foyers »
D'autant plus qu'avec cette même et seule antenne, quatre cases sont ainsi alimentées en chaînes de télé brésiliennes. « Il faut acheter une boîte spéciale pour se brancher » , tente d'expliquer Maria. Cette « boîte » permet en effet à plusieurs foyers de bénéficier de la réception satellite. « Ce n'est pas compliqué, explique un vendeur dans un magasin électroménager. Il faut juste acheter un répartiteur et que chacun possède son boîtier qui est relié à la parabole » . Le vendeur installe lui-même les paraboles à ses clients (pour environ 120 euros). C'est peu dire qu'il en connaît un rayon sur le sujet. Dans son établissement, sont vendus des kits complets (parabole, récepteur et boîtier) qui permettent de capter une trentaine de chaînes « auriverde » .

De 300 à 400 euros le kit complet
Pour 400 euros (plus l'installation), l'affaire est pliée. Car derrière, point d'abonnement mensuel à verser. « Il suffit d'avoir la parabole et le bon récepteur pour avoir les principales chaînes publiques qu'on trouve dans tout le pays » , précise le vendeur. Et ces fameux « kits complets spécial Brésil » , il en vend « une dizaine, peut-être une quinzaine par mois sur Cayenne » . D'après lui, « hormis la communauté brésilienne, il y a de nombreux Guyanais aussi qui s'y mettent, pour apprendre à parler le portugais. Beaucoup de monde fait du business de l'autre côté de l'Oyapock, alors ils s'intéressent, c'est normal » . Et pour les clients les plus intéressés, le vendeur n'hésite pas à sortir le grand jeu. Et de proposer ainsi une parabole sortie de sous le manteau, « avec tout ce qui va avec, pour 300 euros seulement. Ma femme fait des bons prix, glisse-t-il. Et pour l'installation, je m'en occupe » . La provenance du produit est toute tracée...
Car à La Mâtine ou ailleurs, la plupart des paraboles proviennent directement du Brésil. « Je ne connais personne dans mon quartier qui a acheté son antenne en Guyane » , rigole Marcos. « Cela coûte presque deux fois moins cher là-bas. Ça dépend aussi de la taille, mais on peut en avoir une petite de qualité pour 200 euros » . Et apparemment, si elles sont bien réglées, ces antennes ne se contentent pas de capter des chaînes brésiliennes. « Quand il y a des matchs de foot européen, on oriente la parabole dans l'autre sens, et on arrive à capter quelques chaînes de CanalSat avec le décodeur brésilien » , prétend cet habitant de Rémire. « Sinon, en comptant les chaînes pirates brésiliennes, on peut en trouver une cinquantaine au total » . José, lui, s'est spécialisé dans l'installation de ces imposantes antennes à ses heures perdues. Il en fait « quatre ou cinq par mois, selon les demandes. Ensuite, tout dépend de l'emplacement et de la qualité des paraboles, mais pour environ 300 euros, je règle tout et je m'occupe de ramener le matériel d'Oïapoque. C'est comme ça que ça marche » .

Du russe...
En Guyane, de nombreux établissements hôteliers ou de restauration n'hésitent pas à mettre la (bonne) langue... pour satisfaire leurs clients. L'hôtel du Fleuve de Sinnamary a ainsi dû spécialement s'équiper de nouvelles paraboles très performantes pour contenter sa nouvelle clientèle. « Et on a mis deux ou trois jours avec des techniciens pour tout installer et tout régler » , raconte Sébastien Haddad, le directeur de l'établissement. Depuis quelques mois, l'hôtel propose donc trois chaînes de télé en russe. « Plus une chaîne en anglais mais qui parle de la Russie » , précise-t-il.
... à l'arabe
À Cayenne, au restaurant les Pyramides, Wajih Kamel a préféré opter pour un bouquet chez Megabriel : « Avec une parabole spéciale, le bon récepteur et une carte, j'arrive à capter une quinzaine de chaînes arabes. Et une centaine de chaînes étrangères au total » . Mais là, il y a bien un abonnement à payer. « Ca me coûte 28 euros que je verse à Megabriel tous les mois » , indique le patron. Qui se souvient « quand toute la communauté libanaise venait (chez lui) pour suivre la guerre du Liban à la télé en 2006-2007 » .

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